Cliquez ici pour retourner au site web du cours

2016/02/10

Wang Ruoshui, Discussing the Problem of Alienation

Billet de Marie-Hélène Gendron

Wang Ruoshui, "Discussing the Problem of Alienation," Contemporary Chinese Thought 16.3 (Printemps 1985): 25-38.  Texte original publié en 1980.

Né en 1926 et décédé en 2002, Wang Ruoshui était un journaliste et philosophe chinois qui adhérait aux idées de l'humanisme marxiste ainsi que du libéralisme chinois.  Il a rejoint le parti communiste avant 1949, lors de la naissance de la République populaire de Chine, et a travaillé comme éditeur pour le Quotidien du Peuple, le journal officiel du comité du parti communiste chinois.  Il a longtemps été un fervent partisan du maoisme.  Après la Révolution culturelle, dans les années 1970, il condamne cette dernière ainsi que le culte de Mao.  En 1987, il sera expulsé du parti communiste et continuera à critiquer le régime.

Dans "Discussing the Problem of Alienation," il définit non seulement ce qu'est l'aliénation, mais également comment elle est également présente dans le régime en Chine.  Ce qu'il tente de démontrer dans ce texte, c'est que malgré tous les efforts mis en place pour respecter le marxisme, il n'en reste pas moins que le concept d'aliénation est trop laissé de côté et qu'on n'y porte pas assez attention.  Bien que le problème ait été discuté en Chine, aucun travail n'a été fait pour le résoudre selon lui.  Il démontre dans ce texte que l'aliénation est un important problème dans la Chine où les serviteurs du peuple en sont devenus les maîtres.


Tout d'abord, il explique ce qu'est l'aliénation en donnant l'exemple de la mère qui donne naissance à un fils, l'élève, le guide dans sa vie.  Puis, ce fils devient renégat, n'écoute plus sa mère, lui donne des ordres, etc.  À ce moment-là, le fils devient un alien pour la famille, parce qu'il ne correspond pas à lui-même, à ce qu'il devrait être.  C'est donc cela être aliéné, être différent de soi.  Il introduit ensuite qu'une des formes d'aliénation, c'est celle du culte religieux.  Il s'appuie beaucoup sur la pensée de Feuerbach pour expliquer sa réflexion.  Il reprend l'idée que la religion ne façonne pas l'homme, que c'est plutôt l'homme qui façonne la religion.  C'est ainsi que par exemple Dieu est doté de multiples caractéristiques humaines.  Selon Feuerbach se soumettre à la merci de Dieu, c'est l'aliénation.  Il en découle alors que le gouvernement est une aussi une aliénation.  Dieu n'a été inventé que pour réconforter le peuple en peine. Ce que Wang Ruoshi essaie d'expliquer c'est que tout ce qui est d'abord partie du peuple et qui monte au point de lui devenir supérieur est aliénation.  Il explique ensuite ce qu'est l'aliénation au travail qui est une théorie selon laquelle plus on produit (connaissances, richesses, etc) moins on possède.  Plutôt que de libérer les travailleurs, le fruit de leur travail devient leurs chaînes.

Selon ce texte, l'aliénation économique est à la source de toutes les formes d'aliénation, dont le capitalisme est une plus grande forme.  Toutefois, on découvre que le socialisme, qui devrait en être le remède, en pratique lui aussi suscite de l'aliénation.  On retrouve encore l'aliénation intellectuelle, mais aussi politique et économique.  D'abord, le culte de la personne est une forme d'aliénation selon Wang Ruoshui : il ne faudrait pas tout faire pour le leader et le poser sur une place supérieure au reste du peuple.  Le leader doit être là pour servir le peuple.   Cela découlerait de la mentalité féodale chinoise.  C'est ainsi que le président Mao est devenu un important symbole sur lequel tout le monde reposait.  Toutefois, si on comprend bien le texte, c'est aliénant de se reposer sur une personne qui possède le pouvoir et de le rendre supérieur à tous.  Cela donne l'impression que tout provient du leader, alors que  cela est inversion.  Il faut que tout provienne du peuple et que le leader n'en soit que l'expression.  C'est pourquoi il défend l'idée que les organes administratifs de l'état ne doivent pas devenir des maîtres de la société, mais en rester les serviteurs.  L'autorité ne doit être utilisée que pour protéger l'intérêt commun, non pas pour protéger les intérêts d'un seul individu.  Le gouvernement doit être au service du peuple qui lui remet le pouvoir, pas le contrôler.  Ceux qui ne servent pas le peuple devraient alors être remplacés, parce que le peuple n'a pas à avoir confiance absolue en ses dirigeants, mais doit plutôt s'en méfier et s'en protéger.

Si on résume, ce que tente de démontrer Wang Ruoshui, c'est que le peuple chinois est aliéné malgré le chemin socialiste emprunté parce que, entre autres, les anciennes mentalités féodales perdurent.  On fait du leader un personnage important qu'on vénère.  Ainsi le serviteur du peuple devient son maître, ce qui est à éviter absolument.  Il dénonce ainsi le culte de Mao, mais aussi l'exploitation et le développement rapide de l'industrie au détriment du peuple qui en souffre.  Le peuple doit être souverain et en mesure de remplacer ceux qui le gouvernent s'ils pensent trop à leur propre profit.

Ce qui est intéressant de ce texte de Wang Ruoshui, c'est qu'il démontre en s'appuyant sur les essais de Feuerbach, Engels, Marx, Lenin, etc que si le capitalisme est une politique économique aliénante, le socialisme ne résoud pas non plus le problème de l'aliénation.  On l'a d'abord vu quand il parle du cas des soviétiques dans l'introduction qui ont dû finalement reconnaître qu'il y a des cas d'aliénation dans leur régime, mais aussi dans tous les exemples qu'il cite de la Chine.

No comments:

Post a Comment

Note: Only a member of this blog may post a comment.