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2016/03/15

Cui Zhiyuan, "How to Comprehend Today's China"

Cui Zhiyuan, "How to Comprehend Today's China: An Interpretation of the 'Comparatively Well-Off Society," Contemporary Chinese Thought 37.4 (Été 2006): 41-47. Texte original publié en 2004.

Cui Zhiyuan (1963-) enseigne la sociologie à l'université Qinghua (Beijing). Il est une figure de proue de la Nouvelle gauche, un mouvement intellectuel né dans les années 1990 qui, comme l'a mentionné M. Ownby dans la bibliographie collective, cherche à renouveler la tradition socialiste/communiste en s'inspirant des expériences révolutionnaires, populistes ou réformistes dans le monde et dans l'histoire plus que de Mao. Cui aida Bo Xilai (aujourd'hui en prison) dans sa tentative réformiste alors que ce dernier dirigeait le Parti communiste à Chongqing.

La question de l'auteur est simple: comment doit-on comprendre la Chine contemporaine? Pour y répondre, il utilise un concept du XIXe siècle, le « petty bourgeois socialism » (« socialisme petit-bourgeois »), pour décrire l'économie chinoise.

Cui postule que la Chine peut être qualifiée de « comparatively well-off society ». Malgré des différences de revenus significatives et des écarts régionaux, les réformes auraient profité à un nombre relativement grand nombre de personnes. L'auteur affirme que le concept de « petty bourgeois socialism », prôné par John Stuart Mill, notamment, pourrait constituer un fondement de cette société relativement bien nantie. Même si Marx avait raison de dire que ce socialisme ne peut mener à la victoire de la révolution prolétarienne, Cui prétend qu'une société relativement bien nantie pourrait être vue comme une société où on assiste à l'universalisation de la petite bourgeoisie. Comme dans la vision marxiste de la société socialiste, il n'existerait plus de prolétariat, c'est-à-dire la classe qui ne fait que vendre sa force de travail.

Le « socialisme petit-bourgeois » est un mélange du socialisme et de l'économie de marché. La relation employeur-employé cède graduellement la place à un partenariat: soit les ouvriers deviendront les partenaires des « capitalistes », soit ils géreront les entreprises eux-mêmes. Cui affirme que ce modèle ressemble au système développé en Chine rurale à partir des années 1980, le « joint-stock cooperative system »: les travailleurs, tout comme le détenteur du capital, détiennent des parts de l'entreprise simplement en fournissant leur force de travail.

Le concept de « socialisme petit-bourgeois » peut donner confiance à la Chine alors qu'elle tente des innovations systémiques. Ceci permettra de résister à la vague dominante à l'échelle mondiale, la « social-démocratie », que l'auteur définit comme le fait d'accorder de l'importance à l'efficacité et à l'équité dans un système donné. Cui critique la social-démocratie. D'abord, elle nuirait aux innovations, vu qu'elle recherche l'efficacité et l'équité dans un système déjà défini. Ensuite, la social-démocratie ne se soucie que de l'équité lors de la « distribution secondaire »; on ne change pas la structure économique; on continue les privatisations tout en donnant aux chômeurs le minimum pour survivre.

Cui critique le consensus intellectuel voulant que les réformes chinoises reposent avant tout sur la privatisation et l'ouverture au marché (« marketization »). L'« économie socialiste de marché » constitue une innovation systémique ayant contribué au succès économique de la Chine. Les terres appartiennent à l'État mais sont vendues sur le marché. Ainsi, on assure une efficacité et une équité dans la « distribution primaire ». L'auteur conclut en revenant à sa question initiale: ni le socialisme traditionnel, ni le capitalisme, ni la social-démocratie ne permettent donc de comprendre la Chine contemporaine.

Le texte de Cui, une source primaire, est donc argumentatif. La contribution principale de l'auteur est l'introduction d'un cadre théorique nouveau, celui du « socialisme petit-bourgeois », pour décrire la situation de la Chine. Évidemment, en disant que ce cadre est nouveau, je ne dis pas que Cui l'a inventé. La nouveauté consiste à l'utiliser pour interpréter la « société relativement bien nantie » de la Chine.

Enfin, je crois que l'apport principal du texte est de stimuler la réflexion du lecteur à propos de la Chine contemporaine en délaissant les phénomènes réels mais déjà abondamment utilisés pour décrire l'évolution du pays dans les dernières décennies (privatisation, ouverture au marché). Je crois que l'article est très intéressant et convaincant (il m'a d'ailleurs poussé à choisir Cui pour mon travail de session). Ma principale réserve est que sa brièveté ne permet pas à Cui d'entrer dans beaucoup de détails à propos de la nature du système économique chinois.

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