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2015/03/30

Solving China's Peasant Issues Requires a New Way of Thinking

Texte de CONGOST Antoine

Texte de Geoff Raby et Yu Jianrong.

Geoff Raby and Yu Jianrong (entretien), « Solving China's Peasant Issues Requires a New Way of Thinking », Contemporary Chinese Thought 46.1 (Automne 2014): 23-36.  Texte original publié en 2010.

Geoff Raby, l'ambassadeur d'Australie en Chine, discute ici avec Yu Jianrong. En plus d'être un activiste sur le web, Yu Jianrong dirige le Rural Development Research Institute of The Chinese Academy of Social Sciences, où il est aussi professeur. Il porte un intérêt particulier pour les conflits sociaux, la gouvernance légitime et les politiques rurales. Réformiste, il tient un discours assez trempé sur la question de la condition paysanne et son rapport au droit chinois, n'hésitant pas à remettre en question la gouvernance du Parti. Ce texte s'inscrit directement dans cette dynamique.

En effet, dans cette conversation, Geoff Raby et Yu Jianrong partagent un constat. Ce constat, c'est celui d'une augmentation rapide des incidents de masse dans le pays depuis son boom économique, qui sont pour leur immense majorité liés à des mouvements de défense des droits, que ce soit par les paysans, les ouvriers, ou les travailleurs urbains. Yu Jianrong discute ici plus en détail le cas des conflits et des revendications paysannes. Il tente d'identifier les causes de l'augmentation de tels mouvements et du malaise installé dans la population paysanne en Chine. Il pose la question suivante : comment résoudre ces problèmes ?


Yu Jianrong base son argumentation sur ses propres travaux de recherches, notamment The Rights Defense Struggle of Modern China’s Peasants: A Study of Hengyang, Hunan Province, et A Record of Anyuan: The Glory and Dreams of a Class. Il se sert aussi d'une observation empirique, celle d'une société chinoise en pleine mutation, que Raby est le premier à évoquer dans la conversation. Elle provient évidemment de sa position privilégiée en tant que membre du Rural Development Research Institute, mais aussi d'articles récents dans la presse. Il dresse d'abord une typologie des mouvements de masse, puis s'attarde sur le problème de l'attribution des terres, et finit par exposer les tenants et les travers du système légal chinois en ce qui concerne l'agriculture et les milieux ruraux.

Yu Jianrong amène progressivement sa réponse à la question. Le mouvement de résistance au gouvernement dans les campagnes chinoises correspond à ce qu'il appelle une « law based resistance », où les revendicateurs se basent sur le droit établi pour faire valoir leurs intérêts, où ils sont davantage soucieux de faire respecter l'ordre légal en place que de protéger et d'obtenir des droits, et où ils n'hésitent pas, paradoxalement, à user d'actions illégales. Yu Jianrong met aussi l'accent sur le fait qu'avec une grande majorité de Chinois travaillant dans les campagnes, la stabilité de ces dernières et primordiale pour l'ensemble du pays, et donc pour  le gouvernement, qui doit, selon Yu, y accorder une grande importance. Le problème d'une telle agitation, en fait, réside dans la question des terres. Cette question est aujourd'hui d'autant plus importante qu'elle amène  une participation transgénérationnelle, une action désormais proches des espaces côtiers développés, et avec des méthodes plus variées, parfois illégales. Le problème des expropriations foncières et de la précarisation de la paysannerie trouvent leur source dans le système légal, pour trois raisons : la collectivité paysanne n'est pas un sujet légal et ne peut pas faire bloc quand elle adresse ses revendications légales, elle ne peut répartir la propriété entre les individus comme elle l'entend, et enfin les compensations pour la réquisition des terres est « coercitive et monopolistique » . En bref, les paysans ne peuvent légalement pas décider eux-mêmes de la disposition des terres. Yu Jianrong finit de répondre à la question initiale en préconisant une nouvelle approche : retourner à une privatisation totale des terres n'est pas une solution, il faut repenser le système existant avec plus d'égard pour l'occupation, la disposition et l'exploitation des terres. Il faut donc « repenser » le système foncier rural plutôt que de le remplacer ou de satisfaire les revendications au cas par cas, ceci afin d'effacer ses incohérences et apaiser les mouvements revendicateurs qui agitent les campagnes chinoises.

Le texte montre clairement les enjeux cruciaux que représentent les luttes paysannes : si ils ne sont pas résolus, ces problèmes pourraient menacer la « modernisation rurale et la stabilité et le développement sociaux ». Pour y remédier, Yu Jianrong n'hésite pas à pointer directement du doigt.
Ce qui paraît novateur aussi, c'est qu'il identifie bien le problème majeur qui se pose aux activistes ruraux : ils se réfèrent en fait davantage à un répertoire de droits humains fondamentaux, qu'au cadre légal déjà établi, en transcendant le système légal chinois établi, ces droits n'étant pas systématiquement garantis par la loi en Chine. C'est bien cela qui pose problème au gouvernement, qui ne peut pas lâcher prise sur ce terrain au risque de voir le reste du pays s'embraser, demandant une cinquième modernisation, la libéralisation politique. Ce que propose l'auteur ici est donc une alternative, un compromis pour les deux partis : la réforme du système foncier rural. C'est intéressant car il se veut précis et réaliste, ce n'est pas une simple critique du gouvernement, mais une proposition pratique visant à la résolution d'un problème réel. Le texte a également le mérite de montrer que les politiques du gouvernement, en plus de ne pas être efficaces dans ce cas précis,  n'avancent pas unilatéralement comme des rouleaux compresseurs mais rencontrent de plus en plus de vives résistances dans la population et des critiques de la part du monde intellectuel, comme celle que Yu Jianrong fait ici.



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