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2015/03/23

China's Last Communist: Ai Weiwei

Christian Sorace, "China's Last Communist: Ai Weiwei", Critical Inquiry 40 (Winter 2014).
Texte de Matthieu Daiki

Christian Sorace est professeur assistant en science politique à l'université Hobart et William Smith, rédacteur d'une thèse, présentée à l'université d'Austin (Texas), sur les relations entre la société et l'Etat chinois après le tremblement de terre de 2008. Ses recherches portent, entre autres, sur les transformations politiques de la Chine rurale, les théories post-marxistes et les politiques menées dans les Etats autoritaires.  

Dans son article, Christian Sorace étudie le cas d'Ai Weiwei, devenu un symbole de la dissidence en Chine. Pour l'opinion publique occidentale, selon une vision héritée de la guerre froide, Ai Weiwei est perçu comme un défenseur des libertés faible face à un Etat tout-puissant. La vérité est plus complexe. L'auteur souligne en effet que loin de se situer dans la plus pure tradition libérale, l'action d'Ai Weiwei trouve ses racines dans l'idéologie communiste de la période du Yan'an et celle de la Révolution culturelle. Christian Sorace nous aide ainsi à mieux comprendre les motifs idéologiques d'Ai Weiwei dont la vie finit par se confondre avec son art. 

Une des obsessions du parti communistes lors de la période du Yan'an était de ne pas perdre le lien avec le peuple. Une des solutions pour remédier à l'inertie bureaucratique fut de souligner l'importance du débat démocratique, par la pratique dite de "la critique et de l'autocritique". Celle-ci est au cœur de la démarche politique et artistique d'Ai Weiwei. Sans pour autant réhabiliter Mao, il reproche à l'Etat d'empêcher la société de se réformer en étouffant toute critique et autocritique. Ai Weiwei joue donc la critique permanente contre la stabilité, l'égalité de tout un chacun contre la hiérarchie du parti. 

L'engagement total d'Ai Weiwei, qui va jusqu'à se dénuder pour ses photographies et installer des caméras dans sa chambre à coucher, participe d'une démarche esthétique liée au maoïsme en ce que toute critique se doit d'être rendue publique et martelée. Même l'intimité octroyée par le régime peut être remise en cause. Vie, art et politique sont mêlées. Outre ce lien entre l'art d'Ai Weiwei et son maoïsme, le célèbre dissident se réclame aussi d'Andy Warhol, dont la personnalité privée se confond avec sa personnalité publique telle qu'exprimée dans son art. Dans cette optique, internet se révèle pour Ai Weiwei un outil artistique davantage qu'un moyen de communication politique, rendant le public privé et le privé, public.

Cette interprétation d'un Ai Weiwei moins libéral que maoïste dans l'âme permet de mieux saisir sa démarche artistique et politique, loin d'être réductible à un show permanent et obscène où la critique serait superficielle. C'est le fond maoïste de son action qui donne tout son sens à son œuvre. Avec l'article de Christian Sorace, on sort de la vision convenue du dissident seul contre un Etat tout-puissant, vision qui sert aussi bien l'Occident et ses relais (artistiques et médiatiques) que le parti communiste, vision qui élude totalement la réelle démarche d'Ai Weiwei.  

 

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