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2015/02/15

Deng Tuo: Culture, Leninism and Alternative Marxism in the Chinese Communist Party

Texte de CONGOST Antoine

Cheek, Timothy, 1981. « Deng Tuo: Culture, Leninism and Alternative Marxism in the Chinese Communist Party », in The China Quarterly, No. 87 (Sep., 1981), pp. 470-491. 

On doit cette analyse de la vie et de l’Œuvre de Teng Duo au professeur Timothy Cheek. Il enseigne à l'Institut de études asiatiques de l'Université de Colombie Britannique, à Vancouver, dont il dirige le centre des études chinoises. Il s'intéresse particulièrement à l'histoire chinoise du XXe siècle, à l'histoire du Parti communiste chinois (PCC), et au rôle des intellectuels dans la vie publique en Chine. Le présent texte fait la fusion de tous ces intérêts puisqu'à travers l'analyse de la pensée de Deng Tuo, c'est une bonne partie de l'histoire du PCC mais aussi du pays qui est couverte, tout en éclairant le rôle de Deng Tuo dans la vie intellectuelle et politique jusqu'à bien après sa mort dans les années 1980.

Deng Tuo (1912-1966) était un intellectuel chinois, cadre du PCC où il était chargé de la propagande. Il dirigeait aussi la rédaction du Quotidien du Peuple. Il prenait régulièrement position contre Mao, qu'il critiquait plus ou moins explicitement, souvent sous un nom de plume. Ces piques envers Mao, sa politique et son idéologie sont devenues de plus en plus prononcées avec le temps. Il fut pour cela bafoué dans le discours officiel du PCC durant la Révolution culturelle de 1966, menant à son suicide, puis réhabilité et même loué sous Deng Xiaoping avec la libéralisation du pays, des années après sa mort. Ici, il s'agit pour l'auteur de montrer que la réalité est plus complexe : Deng Tuo avait plusieurs facettes – il était à la fois historien, journaliste, bureaucrate, poète, théoricien marxiste - et ses opinions et son idéologie étaient finalement nuancées. A partir de là, comment mieux expliquer la purge dont il fut victime en 1966 ?



Pour répondre à cette question, Timothy Cheek s'appuie évidemment sur la vie de Deng Tuo mais aussi sur presque la totalité de son Œuvre, de ses débuts jusqu'à sa mort. Le texte est d'ailleurs jalonné par l'analyse de ses différents écrits, par périodes de sa vie. Tous les genres approchés par Deng Tuo, sous son propre nom ou sous un nom de plume, sont abordés : ouvrages d'Histoire, essais philosophiques, rapports politiques, éditoriaux dans les journaux, et même de la poésie. Cela permet à l'auteur de mieux rendre compte de la pensée de l'intellectuel.

Cette analyse mène Cheek à conclure que les opinions et l'idéologie de Deng Tuo n'étaient pas si tranchées et foncièrement dirigées contre le Parti et Mao en eux-mêmes. L'auteur nous montre ici un Deng Tuo mettant le matérialisme historique marxiste au centre de son analyse, tout comme l'importance cruciale donnée par l'intellectuel à l'expertise politique dans la formation des responsables du PCC : pour lui, la théorie compte autant que les idées et le sentiment révolutionnaire, c'est d'ailleurs un des points sur lesquels il critiquait Mao qui avait tendance à négliger cela. Sa théorie, le « léninisme chinois », lisait les changements historiques à travers les relations et les forces de production, contrairement à Mao et l'accent qu'il mettait sur les forces matérielles. Il prônait l'utilisation de méthodes scientifiques dans l'analyse et l'exercice politique, mais aussi l'importance de l'héritage culturel chinois. L'analyse de l'auteur montre un intellectuel positif qui croyait fermement en la nécessité du Parti et d'un fort leadership pour diriger le pays. Il n'était absolument pas un libéral voire un démocrate comme il a pu être accusé par ses pairs. Il a davantage été mis à mal pour ce que Mao voyait comme des attaques personnelles. Son attachement à certaines valeurs traditionnelles, que l'on voit par exemple dans son intérêts pour la littérature ancienne, et aussi un facteur d'explication dans le contexte de la révolution culturelle.

Finalement, le texte permet de saisir la complexité et la diversité de la vie intellectuelle dans la Chine de Mao. La doctrine du Grand Timonier ne faisait pas toujours consensus et rencontrait des critiques, souvent bienveillantes et constructives, telles que celles de Deng Tuo, qu'il n'a pas su saisir. Dans le cas contraire, sans doute des échecs tels que le Grand bond en avant n'auraient pas eu lieu. Malgré les apparences données par Mao, le communisme de cette époque se cherchait, se pensait et se repensait encore. Le texte nous éclaire aussi sur les différentes interactions entre intellectuels et cadres au sein du Parti à l'époque, par exemple le rôle protecteur de Peng Zhen vis-à-vis de Deng Tuo. On comprend mieux comment fonctionnent le rôle des pensées et des contre-pensées, des différentes idéologies, au sein du Parti. 


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